En 2012, la presse dévoilait les travaux d’un groupe de travail composé de membres de l’EVAM et du SPOP, visant à rendre insupportable la vie des débouté-e-s de l’asile; en avril 2014, des employé-e-s de l’EVAM dénonçaient à l’interne les conditions de vie dans les abris PC ; le 11 juin 2014, un groupe d’activistes occupaient les locaux de l’EVAM pour dénoncer les conditions de logement imposées aux demandeurs d’asile et débouté-e-s ; le même jour, 500 personnes manifestaient dans les rues de Lausanne et demandaient une véritable politique d’accueil des migrant-e-s.
Aujourd’hui c’est au tour des « bénéficiaires » de l’EVAM de faire entendre leurs voix. Par une pétition collective adressée à la direction de l’EVAM, plusieurs dizaines de personnes venues d’Erythrée dénoncent les conditions dans lesquelles elles vivent.
Ces personnes ont quitté l’Erythrée en passant par le Soudan et la Lybie, elles ont traversé la Méditerranée pour atteindre l’Italie, avant d’arriver finalement en Suisse. Au lieu de protection, elles se retrouvent logées en bunker alors que leur demande d’asile n’a même pas encore été examinée. Ce qu’elles disent devrait nous interpeller ; leur parcours à lui seul montre leur détermination et leur courage. Lorsque des migrants qui ont fait une si longue route, dangereuse et éprouvante, pour arriver ici, se plaignent de leurs conditions de vie, il est impossible de rester sourds à leurs renvendications.
Celles-ci se concentrent sur leurs conditions de logement : « Nous sommes épuisés, nous manquons de sommeil. La nuit, il y a tout le temps du bruit. Aucun d’entre nous n’a pu dormir une nuit complète depuis qu’il est dans le bunker. […] Nous avons besoin d’être logés dans un environnement calme et sûr. […] » et sur la nourriture : « La nourriture représente également un grand problème. Tous les jours nous mangeons la même chose. Nous n’avons aucune possibilité de choisir notre nourriture. »
Les signataires de la pétition ne demandent pas la lune : ils veulent simplement vivre dans des conditions dignes. L’EVAM nous rétorquera qu’il n’y a pas de logements à disposition. Peut-être, mais est-ce une raison pour fermer les abris durant la journée et condamner leurs hôtes à rester dehors ou dans des structures de jour ? Est-ce une raison pour édicter des réglements si stupides et inflexibles qu’il n’est même pas possible à qui loge dans un bunker d’en sortir le matin pour savoir le temps qu’il fait et rentrer chercher une veste si besoin ? N’est-il pas temps de prendre des mesures volontaristes pour trouver des logements décents ?
L’EVAM applique des règlements chicaniers et procéduriers pour pousser les gens à bout, les forcer à quitter les structures d’hébergement et entrer dans la clandestinité. Ce n’est pas son rôle, et nous demandons, une fois de plus qu’une commission d'enquête indépendante soit chargée d'investiguer sur les dysfonctionnements de l'EVAM et de formuler des recommandations pour que le mandat d'accueil des migrants soit respecté.
Le droit d’asile a été vidé de son sens par les multiples révisions prétendument destinées à accélérer les procédures. Nous demandons à la majorité de gauche du canton de Vaud de reprendre en main le dossier de l’asile et de mettre fin à la violation des droits humains qu’une gestion desastreuse a entraînée. Nous exigeons l’arrêt immédiat des renvois vers les pays européens signataires de l’accord Dublin, des pays qui sont débordés et ne peuvent assurer un traitement adéquat des demandes d’asile. Ces accords vident de leur sens le droit d’asile et il est temps d’avoir le courage de les dénoncer. Nous refusons d’assister les bras croisés à la dégradation des conditions de vie des personnes venues ayant décidé de quitter leur pays dans l’espoir d’une vie meilleure. La Suisse a le devoir, et les moyens, d’accueillir et de protéger celles et ceux qui en font la demande. Nous soutenons donc pleinement les revendications émises aujourd’hui par un groupe de migrant-e-s et demandons que leurs voix soient entendues.
25 août 2014
Collectif Droit de rester, Lausanne, et Solidarité sans frontières, Berne.